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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/97

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vagant ; tous leurs casques verdâtres, vus par en dessus, brillent au soleil comme des cailloux de marbre. Qu’est-ce qu’ils peuvent bien faire, dans cette immobilité si attentive ?

— Mais, ils sont au théâtre ! m’explique en riant l’officier italien, qui m’accompagne.

En effet, les plus grands artistes viennent jouer là pour eux, en plein vent, et la Duse en personne est, paraît-il, arrivée hier au soir à leur intention, — dans cette ville que je ne dois pas nommer et où l’on ne tolère la nuit que des lampes bleues.

Village et théâtre s’enfoncent, disparaissent sous nos pieds. Nous montons par une de ces belles routes toutes neuves, dont la présence et la perfection me confondent. Passent quelques derniers hameaux, qui ne sont plus que d’informes amas de ruines ; il n’y a plus d’arbres, à peine de maigres broussailles ; nous sommes arrivés à la zone uniquement rocheuse, inhospitalière pour les hommes et maintenant criblée de trous, égratignée de toutes parts par la mitraille. On se représente du reste ce que doit être ici la malfaisance particulière des obus, ne ren-