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Page:Loti - La troisième jeunesse de Madame Prune, 1905.djvu/126

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terre humide. Malgré la présence enjouée de cette dame, on s’imprègne ici, dans le silence, de la japonerie spéciale qui émane du temple aux lignes simples, et qui est une japonerie haute et sereine. On sent comme des esprits, des essences très inconnues, rôder sous les futaies, dormir au fond des grosses pierres aux têtes rondes. Et la tombée du soir vous apporte dans ce recoin du Japon une petite terreur charmante, dont on cherche en vain le sens introuvable.

En quittant la maison-de-thé, je continue souvent de suivre le sentier qui monte, jusqu’à l’instant où il finit dans la brousse. Sur des pierres moussues émergeant du sol, encore deux ou trois de ces vieux temples pour poupée, inquiétants à rencontrer malgré leur petitesse de jouet d’enfant ; mais les fougères, les racines deviennent de plus en plus souveraines, dans la nuit verte qui s’épaissit, et tout se perd bientôt au fond des bois, où les boutons des camélias sauvages, en retard sur ceux des jardins d’en bas, commencent à peine à rougir…