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Page:Loti - La troisième jeunesse de Madame Prune, 1905.djvu/163

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n’ont que des yeux à peine ouverts, semblaient n’en avoir plus du tout ce soir, convulsés qu’ils étaient par le rire ; et les innombrables bébés, plus petits et plus jolis que nature, dans les bras des mamans, continuaient leur sommeil de poupée.

Ma belle-mère, qui est au fond une créature sans détours, n’ayant eu d’autre objectif dans l’existence que de donner le plus possible de citoyens et de citoyennes à la patrie, s’amusait franchement, sans toutefois le laisser paraître plus qu’il n’était convenable. Madame Prune, au contraire, qui, dans sa première Jeunesse, on peut bien le dire sans offense, a plutôt marivaudé comme les dames en scène, a plutôt baguenaudé sur la question si sérieuse du peuplement de l’empire, madame Prune semblait mélancolique et pincée. Ce spectacle évidemment était mal choisi pour elle, nous ne le comprimes que trop tard, madame Renoncule et moi ; elle pouvait y trouver des allusions gênantes ; de plus, veuve depuis peu de temps en somme, sans doute souffrait-elle, dans son culte pour la mémoire du regretté M. Sucre