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Page:Loti - La troisième jeunesse de Madame Prune, 1905.djvu/203

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Devant moi cheminait une dame de galante tournure, ayant cette ligne incomparable de la nuque et des épaules qui la décèlerait entre mille : madame Prune, coiffée aujourd’hui en petite mousmé, en petite écolière, avec un piquet de roses pompons se balançant au bout d’une longue épingle d’écaille !…

Avertie par son flair toujours si sûr, elle se retourna pour me montrer, dans un sourire, l’un des derniers râteliers laqués de noir que Nagasaki possède encore : « N’est-ce pas, demandaient pudiquement ses yeux baissés, n’est-ce pas, cher, que ça ne va pas trop mal ? »

— Madame Prune, j’allais vous le dire. Mais je vous prie, expliquez-moi…

Alors elle me conta que, depuis le temps des ancêtres lointains, c’était de tradition que les dames, ce jour du calendrier, fussent coiffées comme les jeunes filles, et les jeunes filles comme les dames.

Et tout était joli autour de nous, aussi bizarrement joli et aussi invraisemblablement arrangé que dans une aquarelle japonaise. Ce faubourg où nous passions avait l’air en pleine