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Page:Loti - La troisième jeunesse de Madame Prune, 1905.djvu/221

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Chine, où Nagasaki sera notre lieu de ravitaillement et de repos. Et je la reverrai, cette mousmé, j’entendrai encore sa voix, très doucement bizarre, répéter, avec un accent qui fait sourire, les mots français qu’elle s’amuse à apprendre…

Quant à madame Prune, c’était trop haut perché pour cette fois, le faubourg qu’elle habite. Mais nous reviendrons, nous reviendrons, et, s’il plaît à la Déesse de la Grâce, cette idylle, ébauchée entre nous il y aura seize ans bientôt, ne se dénoue point encore…

Ce soir donc, à l’heure où le soleil se couche dans de longs voiles de brume, le Japon a disparu ; l’île amusante s’est évanouie dans les lointains d’une immensité toute pâle, qui luit comme un miroir sans fin, et qui ondule très lentement, avec une câlinerie perfide. Nous faisons route vers le Nord et vers la Chine. Il y a quinze ans, après un amollissant séjour dans ce même coin du Japon et un mariage pour rire avec une certaine petite Chrysanthème, je remontais ainsi la mer Jaune, par un calme pareil, sous des brumes comme celles-ci, un