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l’île délicieuse, un mois ou deux, en passant. Sans cette certitude de revenir, il est probable qu’à ce moment-là je ne serais pas parti : la laisser pour toujours eût été au-dessus de mes forces, et m’eût brisé le cœur.

À l’approche du départ, j’étais étrangement obsédé par la pensée de cette Taïmaha, qui avait été la femme de mon frère Rouéri. Il m’était extrêmement pénible, je ne sais pourquoi, de partir sans la connaître, et je m’en ouvris à la reine, en la priant de se charger de nous ménager une entrevue.

Pomaré parut prendre grand intérêt à ma demande :

— « Comment, Loti, dit-elle, tu veux la voir ? Il t’en avait donc parlé, Rouéri ?… Il ne l’avait donc point oubliée ? »

Et la vieille reine sembla se recueillir dans de tristes souvenirs du passé, retrouvant peut-être dans sa mémoire l’oubli de quelques-uns, qu’elle avait aimés, et qui étaient partis pour ne plus revenir.

XXXVII

C’était le dernier soir du Rendeer