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Page:Loti - Le Mariage de Loti, 1880.djvu/223

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une longue course, que je lui cachais quelque chose de triste et d’inattendu. J’avais perdu l’habitude des larmes, mais depuis la veille j’avais besoin de pleurer ; dans l’obscurité du banc de quart, personne ne le vit que mon frère John ; auprès de lui je pleurai là comme un enfant.

La mer était grosse, et le vent nous poussait rudement dans la nuit noire. C’était comme un réveil, un retour au dur métier des marins, après une année d’un rêve énervant et délicieux, dans l’île la plus voluptueuse de la terre……


… Deux silhouettes lointaines, deux nuages à peine visibles à l’horizon : l’île de Tahiti et l’île de Moorea……

L’île de Tahiti, où Rarahu veille à cette heure en pleurant dans ma case déserte, — dans ma chère petite case que battent la pluie et le vent de la nuit, — et l’île de Moorea qu’habite Taamari, l’enfant qui a « le front et les yeux de mon frère… »

Cet enfant qui est le fils aîné de la famille, qui ressemble à mon frère Georges, quelle chose étrange ! c’est un petit sauvage, il s’appelle