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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/102

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descendantes, pour finir en plainte. Et, comme toujours leurs voix éveillent des vibrations dans ce monde de pierres desséchées, de longs échos inattendus dans ce néant sonore.

Les plantes qui dominent ici et dont le parfum emplit l’air sont presque incolores, à peine plus vertes que les pierres voisines ; elles sentent comme les pommes reinettes au soleil, avec quelque chose de plus violent et de plus poivré. Des gazelles, sans doute, viennent de loin les brouter, car, sur le sable, voici des empreintes de sabots très fins, — très espacés aussi, comme en laisserait le passage de bêtes courant par bonds, brûlant le sol dans une fuite rapide… Et tout à coup, là-haut, les gazelles apparaissent, détalant comme le vent sur la cime d’un des fantastiques remparts ! — et aussitôt perdues, dans les lointains aux éblouissantes blancheurs…



Après la halte méridienne, quand nous avons dormi sur le sable violemment parfumé, la tête cachée sous nos burnous blancs, le réveil amène en nous une sorte d’angoisse du désert que nous avions à peine connue jusqu’à ce jour.