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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/118

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Toujours plus hautes, les montagnes, et plus agité, le ciel ; à certains tournants des gorges, le vent souffle en furie.

Cueilli avec étonnement des fleurs violettes, semblables à des oreilles-d’ours qui, de loin en loin, s’épanouissent, solitaires.

Vers le soir, dans la plus sombre des vallées, entre de plus immenses montagnes de cendre grise, croisé une famille nomade, pendant une rafale. L’homme et la femme demi-nus, — lui, très armé, — ont trois petits ; le plus jeune, bébé de trois ou quatre ans, voyage à califourchon sur l’épaule de sa mère à figure voilée, impayable et charmant avec ses longs cheveux noirs que le vent redresse. Leurs chameaux ont aussi un petit, qui gambade affolé. Leurs chèvres en ont plusieurs qui trottinent en bêlant. — Toute une association errante, bêtes et gens s’aidant les uns les autres, et essayant quand même de se multiplier, de recréer de la vie, malgré le mauvais vouloir de ce sol de mort. — Ils viennent de très loin peut-être et ne savent guère où ils vont pour chercher mieux. Le père, — l’homme, — après nous avoir adressé, avec une certaine crainte, le salut d’usage, s’informe d’où nous venons, nous voyant sans intentions agressives malgré notre nombre, et pose la question vitale : « Avez-vous trouvé de