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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/189

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Et maintenant nous sommes tous sur nos bêtes, prêts à partir enfin.

Il paraît qu’on est content de nous pourtant, de nos cadeaux et de nos attitudes, car des adieux, des souhaits de bon voyage s’échappent de la foule subitement calmée. Et nous nous éloignons avec lenteur, sortant des derniers petits murs de terre, des derniers palmiers de l’oasis, heureux de retrouver peu à peu du silence et d’échapper à cette horde sans lui laisser nos vêtements, le fond de nos bourses ou nos têtes. Il est dix heures bientôt, et le départ a duré trois heures, pénibles et presque graves.

Nous marchons à la débandade, tout de suite disséminés, isolés dans les sables, sur les broussailles tristes du désert. Pour longtemps, sans doute, nous avons dit adieu aux palmiers et à leur ombre ; le sol, étincelant de soleil, est jonché de ces mêmes sauterelles jaunes qui, ce matin, s’abattaient sur Akabah comme de petits nuages.

Un homme me rejoint et s’approche en souriant pour cheminer à mes côtés ; il allonge le bras et nous nous serrons la main, d’un dromadaire à l’autre :