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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/99

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XVII

Mardi 6 mars.

À la splendeur froide du matin, nous sortons de nos tentes. De la gelée blanche est déposée en fine poudre sur le sable, sur les pâles plantes aromatiques, les myrrhes, les absinthes et les hysopes.

La plaine a pris sa teinte neutre du jour ; mais, au-delà du cercle d’horizon plat, surgissent là-bas, comme des profondeurs d’en dessous, toutes les dentelures granitiques de la chaîne du Sinaï : c’est absolument rose, d’un rose lumineux comme celui des transparentes verrières, avec des stries couleur d’iris ; au-delà des désolations incolores et mornes du lieu où l’on est, on dirait l’apparition d’un monde féerique, qui ne tiendrait pas au nôtre, qui serait indépendant et instable dans le vide du ciel.

Des cristaux de glace brillent partout sur les toiles