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Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/206

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mot vide de sens, puisque notre volonté surpasse les imperfections de notre corps périssable. Il est vrai que Zénon mourut à quatre-vingt-dix-huit ans, sans avoir eu, disent les biographes, aucune maladie, même légère ; mais ce n’est pas une objection dont on puisse arguer contre lui, car du fait qu’il sut garder une santé inaltérable, nous ne pouvons conclure logiquement qu’il eût manqué de caractère s’il se fût trouvé malade. D’ailleurs ce serait un abus que d’astreindre les philosophes à pratiquer personnellement les règles de vie qu’ils proposent et à cultiver sans répit les vertus qu’ils jugent supérieures. Bref, et pour ne pas développer outre mesure un discours qui risquerait de durer plus que toi-même, efforce-toi d’élever ton âme, autant qu’il est en elle, ma chère, au-dessus de tes souffrances physiques. Quelque tristes, quelque cruelles que tu les puisses ressentir, je te prie d’être persuadée que j’y prends une part véritable. Elles touchent à leur fin ; prends patience, oublie. Entre les diverses doctrines qui nous attribuent l’immortalité, voici l’heure où tu peux choisir celle qui endormira le mieux ton regret de disparaître. Si elles disent vrai, tu auras éclairé même les affres du passage. Si elles mentent, que t’importe ? tu ne sauras jamais que tu t’es trompée. »


Ayant ainsi parlé, Phrasilas rajusta le pli de son