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Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 8.djvu/144

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— Je le sais bien.

— Vous le saviez ?

— Je le lui permets.

— Et vous ne le lui rendez pas ?

— Non.

— Eh bien, madame Aracœli, voyez-vous, je sais tout le respect que je vous dois. Mais je vous aime trop pour me retenir. Vous n’êtes pas pour moi une cliente comme les autres. Depuis que je viens ici, que je vous vois si gentille, si jolie, si bon cœur, il m’a pris pour vous une affection comme si vous étiez ma fille, et j’ai les larmes aux yeux quand je vous entends parler, parce que vous serez trop malheureuse plus tard si vous continuez d’être si bonne.

— Vous croyez ?

— Si je le crois ! Allez, ça n’est pas pour rien que j’ai cinquante-cinq ans d’expérience. Vous êtes jeune, vous êtes confiante, vous avez un petit cœur tout frais, tout sincère ; Vous vous figurez que plus on aime un homme et plus on le retient ! Détrompez-vous ! Tel que je connais M. Aimery vous ne lui seriez pas fidèle qu’il n’en serait pas plus amoureux.

— Vraiment !

— Quand vous sentirez qu’il se détache, rendez-le sérieusement jaloux et vous verrez alors comme il vous reviendra. Mais il faut garder ça pour les grandes occasions. La première fois si j’étais vous