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Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/123

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voix saccadée. Je les passe. Elle termina ainsi :

« Depuis deux heures j’en ai envie… Il ne veut pas… Ma bouche le dégoûte… Montre-lui, maman… Comme je m’y prendrais sous lui… Comme je sais bien… sans faire de taches… »

Lorsque j’entendis ces mots misérables : « Comme je sais bien… sans faire de taches… » Mais pourquoi souligner les mots d’une pareille scène ! Ceux-là m’ont paru les plus tristes de tous et Charlotte les disait pourtant avec une sorte de ferveur.

Elle entra dans la salle de bains, s’étendit nue sur le carrelage de céramique en se relevant sur un coude, la tête renversée, la bouche ouverte, et se masturba d’une main avec frénésie. Elle ne paraissait pas sentir le froid du sol.

Plus elle se branlait et plus elle prenait d’enthousiasme à s’avilir. Ce qu’elle dit alors, je l’ai noté jadis et je viens de déchirer la page que je n’avais pas le courage de relire jusqu’au bout. Il est deux choses que ma lectrice ne saurait se représenter, les paroles que je veux lui taire et la hâte que j’ai de finir ce chapitre.

Les scènes vraies sont plus difficiles à raconter que les inventions, parce que la logique de la vie est moins claire que celle d’un conte. Vous croyez qu’ici le point culminant dut être l’acte dont je fus témoin ? Pas du tout. Et je ne sais si je pourrai faire comprendre pourquoi.

D’abord je m’y attendais depuis un quart d’heure, et ce que j’imagine est en général plus intéressant que la réalité.

Ensuite il est juste de dire qu’en cette circonstance, le rôle le plus infâme, celui de Teresa, fut