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Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/173

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tères. Je pensai à un vers de Clément Marot… Mais je n’eus pas le loisir de rêver. Mauricette s’était déjà mise au travail.

« Oh ! tout simplement ! lui dis-je. Tu t’y prends comme avec une gousse. Nous n’en sommes pas au cours supérieur. Ne t’occupe donc pas de me faire plaisir. Il ne s’agit que de toi en ce moment. Ce que j’ai sous les yeux, ce n’est pas un jeune satyre qui s’abandonne à la lubricité… Non. Pas ça du tout. Je ne vois rien qu’une délicieuse petite Ricette qui est jolie et timide comme une biche au bois et qui va me dire : « Ce n’est que ça ? » quand elle aura fini.

— Mais tu me préviendras ?

— Chut ! Quand on suce, on ne parle pas. Premier principe : ne pas rouvrir la bouche pour demander au monsieur des nouvelles de sa grand-mère. Et puis on ne rit pas non plus quand on suce.

— Mais c’est toi qui…

— Chut ! Continue. Je te préviendrai. Veux-tu que je me presse ? Oui ? C’est facile. Presse-toi aussi ! Et rappelle-toi ce qui est convenu : tu avales tout de suite, tu dis que c’est bon et tu en redemandes… Ricette chérie ! je suis si bien dans ta bouche ! »

Cette dernière phrase lui fit un plaisir que j’aurais dû prévoir et la piqua au zèle. Les félicitations qui nous flattent le plus sont celles que l’on adresse aux talents que nous possédons le moins. Et puis les jeunes filles qui n’ont pas l’habitude de sucer font cela tout à fait comme elles font l’amour : elles ont donc besoin de se monter jusqu’à un certain degré de passion.