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Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/179

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Pas une seconde je n’eus la pensée d’y consentir ; mais, au lieu de répondre, j’interrogeai :

« Comment as-tu ce goût à ton âge ?

— Parce que je suis la fille de maman.

— Qu’est-ce que tu veux dire ? que tu lui ressembles par le sang ? ou qu’elle t’a…

— Qu’elle m’a dressée ? Dis-le donc ! C’est son mot. Oui, elle m’a dressée comme un chien savant. Et j’aime ça. Je voudrais en faire autant qu’elle.

— Comment s’y est-elle prise ?

— Oh ! ça n’a pas été long ! Comme elle a le même goût, elle a vu tout de suite que moi aussi… Alors, comme on fait au cirque, elle m’a exercée tous les jours avant de… Enfin, tu sais bien la manière de dresser les chiens ; ils font leurs tours avant de manger ; moi, c’était avant de jouir. Et peu à peu maman a vu jusqu’où… jusqu’où je pouvais aller… »

Je haussai les sourcils. Elle hésita et, de cette voix voluptueuse que prennent parfois les très jeunes filles :

« Tu veux que je te dise ? Ça m’excite presque autant d’y penser près de toi que si tu me le faisais.

— Et moi, j’aime cent fois mieux t’écouter que te battre.

— Me battre ? Si ce n’était que ça ! Tu ne connais pas maman ! »

Et, en phrases définitives, elle trancha sa famille comme il suit :

« Je ne peux pas faire comprendre à Lili que maman n’est pas une putain. Mais toi, je pense