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Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/191

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ne sais pas pourquoi… j’ai pleuré comme une bête !… c’est qu’aussi… c’est qu’aussi… »

Je l’entendis haleter, à croire qu’elle suffoquait ; puis elle sanglota de nouveau, me serra de toutes ses forces et avec un accent admirable elle trouva ce cri d’amour :

« Jamais personne ne m’a fait aussi mal que toi ! »


XII

Trente heures s’étaient écoulées depuis la scène précédente. Teresa et ses filles avaient passé la nuit dans la banlieue chez une parente un peu putain, elle aussi, et d’autant plus empressée à les recevoir. Mais je savais déjà qu’après une assez longue discussion, à laquelle toutes quatre avaient pris part, Teresa s’était rendue aux volontés de Mauricette. Je savais même en quels termes elle avait capitulé.

Ainsi que Mauricette l’avait bien prévu, Teresa s’était écriée :

« J’aime mieux le sucer que le vendre, ton pucelage, ma gosse ! J’aime mieux ouvrir la bouche dessous que de tendre la main à côté. Et ça n’empêchera rien. Je te le recollerai. Donne le vrai, nous vendrons le faux et tout le monde sera content. »

Ces sortes de cadeaux coûtent fort cher à ceux qui les reçoivent ainsi. Les moralistes s’ac-