ous avions repris la mer après une relâche de huit jours,
pendant lesquels, comme on l’a vu, le temps avait été
constamment mauvais, et les vents presque toujours au
sud. Le 25, ils revinrent au sud-est, variant jusqu’à l’est,
et nous suivîmes la côte environ à trois lieues d’éloignement. Elle
rondissait insensiblement, et bientôt nous aperçûmes au large des
îles qui se succédaient de distance en distance. Nous passâmes entre
elles et la grande terre, et je leur donnai le nom des officiers des
états-majors. Il n’était plus douteux que nous côtoyions la nouvelle
Bretagne. Cette terre est très élevée et paraît entrecoupée de belles
baies, dans lesquelles nous apercevions des feux et d’autres traces
d’habitations.
Le troisième jour de notre sortie, je fis couper nos tentes de campagne pour distribuer de grandes culottes aux gens des deux équipages. Nous avions déjà fait, en différentes occasions, de semblables distributions de hardes de toute espèce. Sans cela, comment eût-il été possible que ces pauvres gens fussent vêtus pendant une aussi longue campagne, où il leur avait fallu plusieurs fois passer alternativement du froid au chaud, et essuyer maintes reprises du déluge ? Au reste, je n’avais plus rien à leur donner, tout était épuisé. Je fus même forcé de retrancher encore une once de pain sur la ration. Le peu qui nous restait de vivres était en partie gâté, et dans tout autre cas on eût jeté à la mer toutes nos salaisons, mais il fallait manger