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Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/193

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tantôt ces mêmes vieillards, ou d’autres qui leur ressemblaient comme des frères, endosser de la meilleure foi du monde des paternités imputables à de mystérieux jouvenceaux, aussi discrets que serviables. La vérité ne se dévoilait que trop tard.

À la suite de ces discours, Jourgeot rentra chez lui aux trois quarts abruti et plus que jamais perplexe.

Bref, se trouvant dans le même embarras que Panurge et n’ayant pas comme ce dernier la ressource de pouvoir, en la soixante et huitième année de son âge, entreprendre un voyage de circumnavigation pour aller consulter l’oracle de la dive bouteille, comme sa servante d’autre part devenait de plus en plus impérative et pressante, il lui déclara le lendemain matin qu’il la conduirait devant le maire et devant le curé, se disant à lui-même, en manière de consolation, que, s’il était dans son destin de devenir cocu, il le serait certainement moins longtemps que s’il avait suivi l’exemple de ses anciens camarades et s’était comme ces derniers marié vers la trentaine.

Tout s’était passé le plus normalement du monde. Comme il avait suffisamment payé à boire aux jeunes gens, on ne lui avait point fait le charivari ainsi qu’il est coutume de faire aux vieux birbes qui prennent des femmes de beaucoup moins âgées qu’eux. L’héritier ensuite était venu,