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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/123

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LA FIN DE RABEVEL

ardent qui se trouverait à sa place dans votre génération où l’on vit sa vie, un être indiscipliné, ennemi des contraintes volontaires. Ce surgeon demande un tuteur, mais s’il veut des amis dignes de lui, une femme digne de lui, il ne la trouvera dans sa génération qu’en s’adaptant à celle-ci. La vôtre paraît détraquée aux jeunes gens d’aujourd’hui : apporter aux affaires et à la vie cette fièvre malsaine nous dégoûte. La pourriture générale des mœurs, la corruption des consciences, la vénalité des gens, l’issue dramatique de tous les conflits sentimentaux aigus tout cela nous fait crier : Assez ! de l’air pur !

— Vous êtes dur pour nous, dit Bernard piqué. Quel moraliste !

— Ce qu’il y a de plus fort, répondit Marc, c’est que nous ne sommes pas des moralistes. Nous avons simplement réfléchi. Vous êtes hommes d’affaires : eh bien ! c’est le bilan de votre génération qui nous fait peur. Vous êtes condamnés par nos grands-parents au nom des principes hérités de 1848 ; ces principes grandiloquents nous font horreur. Nous vous condamnons au nom des tristes résultats de l’expérience que vous constituez : intellectuellement, le chaos ; socialement, l’iniquité ; moralement, la corruption ; financièrement : la faillite ; internationalement, la guerre, car la guerre viendra. Je dis : nous vous condamnons, je me trompe. Nous avons hâte simplement de vous voir changer ou vous démettre.

Pour la première fois, Noë entendait dans la voix tran-