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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/169

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LA FIN DE RABEVEL

ne savait plus comment il vivait. Rabevel disait attendre d’Australie le plus beau de ses voiliers où il voulait lui confier le rôle de commissaire du bord en attendant le commandement en second. Mais, si proche de le quitter, son affection paternelle se révoltait et il ne cessait de le faire demander. Il avait renoué avec sa maîtresse cette curieuse et frénétique existence de stupre, de haineuses amours coupées d’abandons romantiques, de suicides feints, d’injures, de coups, de baisers. Il quittait parfois Balbine et rentrait, résolu d’en finir, chez sa malheureuse femme toujours prête au pardon. Puis un soir, regardant celle-ci avec des yeux d’étranger, il lui disait adieu, et, devant la porte entr’ouverte de la gourgandine, à genoux sur le palier, il subissait avec une amère volupté les injures puantes qui précédaient l’accueil et dont, à l’heure du spasme, il comptait doubler par le souvenir l’âcre saveur de celui-ci.

Sa maîtresse et lui avaient, chacun de son côté, commencé la procédure du divorce. Mais la rancune de Vassal que Rabevel avait pu faire emprisonner en prévention de coups et de blessures, et l’espérance de Madame Rabevel, imprimaient aux formalités judiciaires une lenteur qu’accroissait la négligence des hommes de chicane. Rabevel ne paraissait plus que rarement à son bureau. Olivier, par crainte et par faiblesse d’abord, était devenu le confident du couple. Au début il écoutait peu, perdu dans le songe d’où il sortait si rarement depuis que l’heure de son départ