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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/228

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LE MAL DES ARDENTS

ne lui était revenu depuis la mort de sa mère. Peut-être avait-il la même cause : cette certitude invincible d’une protection, d’une sécurité inviolable n’était-elle pas irrésistiblement émanée de l’affection supérieure qui l’enveloppait ? Un flux de gratitude jaillit en lui comme une source chaude. Mais il ne disait rien : les paroles d’affection et de reconnaissance sont un tribut dont Isabelle ne voulait point. Il savait qu’elle attendait le jour où il lui apporterait en don son amour soudain épanoui.

Comme elle était proche de lui ! et pourtant il savait qu’il lui restait encore, pour être digne d’elle, à chasser de ses sens cette image impure de Balbine qui le hantait…… Il n’osa pas lui révéler son départ si proche. Il lui dit qu’il s’absentait pour un mois, allant visiter quelques membres de sa famille dans le Rouergue ; il la retrouverait ; d’ailleurs Noë lui donnerait de ses nouvelles.

Isabelle écoutait, silencieuse. Elle devinait un mensonge dont le motif lui échappait à demi. Mais elle pressentait qu’elle ne serait pas remplacée, qu’elle avait la meilleure part dans ce cœur indécis et passionné ; elle se sentait soudain résolue à tout plutôt qu’à ne pas le conquérir tout-à-fait quand elle discernerait l’instant favorable.

L’impression que l’entrevue avec cette Isabelle (dont il jugeait le souvenir comme une image poétique assez pâlie dans sa mémoire et dans son cœur) laissa à Olivier fut une révélation pour lui. Du coup, il ne s’était jamais cru aussi désemparé qu’au moment où il fut près de s’embar-