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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/65

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LE FINANCIER RABEVEL

agence lui fournit dans un bel hôtel du quartier de l’Europe, rue de Lisbonne, tout un étage où il installa avec une hâte fièvreuse des bureaux vastes et confortablement aménagés, ainsi qu’une garçonnière. En huit jours tout fut prêt, le personnel au complet, caissier, comptable, scribes et jusqu’à un valet de chambre qu’il nomma Florent. Mais quand il s’agit de se mettre au travail il n’en eut plus le courage ; l’image d’Angèle dans les bras de François le poursuivait. Il se rongeait de rage et d’une douleur calcinante. Il ne pouvait échapper à son amour.

— Qu’est-ce que je deviens donc ! qu’est-ce que je deviens donc ! se disait-il.

Il alla voir Abraham et lui raconta toute son aventure. L’accueil qui fut fait à ses confidences l’impressionna. Abraham ne lui cacha pas sa réprobation.

— Oui, disait-il, toi qui avais le bonheur de vivre dans une religion qui te donnait la sécurité, voilà ce que tu deviens ! tu rejettes toute contrainte. Les affaires et l’amour ! tu ne t’inquiètes pas d’autre chose. Et moi qui ai fait le tour de la science, je vois maintenant qu’il n’y a rien de précieux que la droiture et la foi, comme l’entendent vos catholiques.

— Ça y est, se dit Bernard, je savais bien qu’il y avait du Pascal dans ce garçon.

Il regarda autour de lui. Il n’y avait point trace de femmes.

— Bon, pensa-t-il, nouvelle toquade. Cela durera six