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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome I (1923, NRF).djvu/221

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LA JEUNESSE DE RABEVEL

même de te tenir à l’œil car au premier tournant, ils te pigeront.

— Bah ! fit Bernard, non sans fatuité. Quelle est ta situation vis-à-vis de ton père ?

— Au point de vue galette ? indépendante. Mon père m’a fait au jour de ma majorité donation d’un certain nombre de titres excellents : obligations de chemins de fer, rentes françaises, actions de la Banque de France, des mines du Nord, de l’affaire Bordes, qui dorment dans un coffre. Cela représente un capital voisin de 800.000 francs et une cinquantaine de mille francs de coupons annuels. Je suis donc tranquille et mon père et toi pouvez vous livrer à votre sport et vous abîmer un peu sans que j’y voie d’inconvénient. Je me demande même comment j’ai pu m’intéresser à autre chose qu’à la science pure et même à autre chose qu’a cette science particulière qu’est l’histoire.

— Comment l’histoire ? Je te croyais plongé dans l’Encyclopédie ?

— Oh ! ce fut une erreur, cela…

— Récente, récente, dit Bernard d’un ton ironique.

— Sans doute. Mais enfin une erreur profitable qui m’a ouvert les yeux. C’est elle qui m’a montré que j’ignorais l’histoire et que celle-ci seule importe à notre connaissance pour les enseignements qu’elle nous donne et la règle de vie qu’elle nous propose. Aussi me suis-je mis à composer une histoire universelle sur un plan tout nouveau. Écoute moi ça.