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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome I (1923, NRF).djvu/30

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LE MAL DES ARDENTS

Il mit sa main sur l’épaule du garçonnet qui, maintenant, marchait à côté d’eux.

— Et de toi, poursuivit-il, petit Bernard Rabevel, de toi nous ferons un grand citoyen ; un noble et vertueux citoyen. Tu promets par l’intelligence et la volonté ; nous les éduquerons comme elles doivent l’être. Veux-tu être bijoutier ? Non. Changeur, géographe, mécanicien ? Tu ne sais pas. Veux-tu mener des hommes, être puissant ? nous t’en donnerons les moyens. Tu seras le plus grand, le plus riche, le maître, tu entends, le maître par la fortune et la puissance.

L’enfant sourit, leva vers Lazare des yeux extasiés, il donna d’un geste brusque et comme d’oubli ou de pardon sa main libre à Noë. Lazare fit un imperceptible signe au jeune homme et continua.

— Oui, tout cela, c’est pour toi que je le disais ce matin, pour toi tout seul. La République t’ouvre ses bras et elle te recevra parmi les plus grands de ses fils. Il reste à en être digne c’est-à-dire à donner l’exemple de la vertu, de la justice, de la bonté ; à se rappeler que tous les hommes sont égaux et frères…

Mais l’enfant, depuis un moment, n’écoutait plus. Ils entendirent sonner sept heures à Saint-Gervais et ils pressèrent le pas. La rue des Rosiers était grouillante de lévites sordides quand ils y entrèrent. Le père, Jérôme Rabevel, qui, sur le pas de la porte, guettait le retour de Noë, les aperçut et cria dans l’escalier que Mr. Lazare