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Page:Lucile de Chateaubriand, ses contes, ses poèmes, ses lettres.djvu/25

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l’escalier de la grosse tour, sous l’horloge dont les aiguilles, réunies pour marquer l’heure de minuit, lui rappelaient toutes les légendes merveilleuses de son enfance ; alors elle entendait des bruits lointains de mort. Et les vieux chrétiens du villages avaient voir l’accomplissement de ses prophéties.

Trop sauvage pour s’attacher aux travaux domestiques, trop hautaine pour se complaire à ses devoirs de fille obéissante, elle donnait toute son âme à son frère René. Elle l’aimait avec souffrance et passion, ne sachant pas aimer sans souffrir, sans faire saigner son cœur. Un jour qu’ils se promenaient tous deux sous les châtaigniers, dans la robuste et verte antiquité d’un bois respecté, elle dit à son frère : « Tu devrais peindre tout cela. »

Pour elle, elle jetait ses rêves sur le papier. C’étaient des tableaux charmants et passionnés. René, qui avait déjà le secret des tristesses magnifiques et des désespoirs enchanteurs, lui révélait quelques lambeaux brûlants de Lu-