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Page:Lucile de Chateaubriand, ses contes, ses poèmes, ses lettres.djvu/26

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crèce ou de Virgile. C’est ainsi qu’ils mêlaient leurs souffles sur la bruyère déserte, au bord des forêts. Communions dangereuses ! Si la volupté pouvait toucher cette grave Lucile, c’est bien dans le vague de la poésie et sous le voile d’une belle tristesse. Sublime et malheureuse enfant, elle nourrissait ainsi les chimères qui devaient la dévorer. Pourtant, c’est le frère et non la sœur chez qui d’abord la crise fut terrible. Il courait toute la nuit à l’aventure, ouvrait les bras, poussait de grands cris, haletant, éperdu. Puis il s’abattait lourdement et pleurait de longues heures. Il voulut mourir et alla jusqu’à mettre dans sa bouche le canon de son fusil de chasse. Enfin une fièvre violente le saisit. Il fut six semaines entre la vie et la mort. Lucile le veilla, le soigna, le sauva.

V

Cette âme en peine crut un moment reconnaître dans la réalité la forme de son rêve. Son frère aîné, qui venait quelquefois à Combourg,