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Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/344

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DE LA NATURE DES CHOSES

Le jette sur la terre, où l’essence vitale
Par les pores ouverts se disperse et s’exhale.

Les puits semblent plus froids en été qu’en hiver.
C’est que la terre aride expulse et rend à l’air
Tout germe calorique attardé dans sa masse.
Plus forte est la chaleur qui règne à sa surface,
Plus la fraîcheur des eaux souterraines s’accroît.
860Quand le sol, comprimé, resserré par le froid,
S’épaissit, dans les puits la terre condensée
Exprime la chaleur en ses flancs amassée.

La fontaine d’Ammon, dont on fait tant de bruit,
Froide pendant le jour devient chaude la nuit.
Contre toute raison, les amis du mystère
Veulent que le soleil l’échauffe de sous terre,
Quand l’ombre a déployé son ténébreux manteau.
Quoi ! les rayons du jour s’épuisent sur cette eau
Sans pouvoir l’échauffer, cela dans le temps même
Où l’astre au ciel jouit de son pouvoir suprême !
Et le terrestre bloc, épaisse profondeur,
Laisserait jusqu’à l’eau pénétrer leur ardeur ;
Quand, sur un simple mur usant leur force vaine,
Leurs feux dans nos maisons se font sentir à peine !
Cherchons d’autres raisons. Cette onde a pour séjour
Un terrain plus poreux qu’ailleurs ; et tout autour
Les semences de feu dorment en plus grand nombre.
La nuit vient, plongeant tout dans la fraîcheur et l’ombre ;
Et le sol refroidi se contracte soudain,
880Comme un corps spongieux pressé par une main,