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Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/345

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LIVRE SIXIÈME

Dans la source exprimant cette chaleur diffuse
Que le toucher signale et que le goût accuse.
Puis quand, sur les rayons du soleil renaissant,
Dans le sol dilaté la chaleur redescend,
L’eau renvoie à ce sol, par les mêmes issues,
Les semences de feu qu’elle en avait reçues,
Et la source reprend sa fraîcheur jusqu’au soir.
D’ailleurs, sous les rayons que l’astre y fait pleuvoir,
L’onde aussi se dilate, ouverte et remuée,
Et la chaleur s’échappe en tremblante buée,
Comme fait au printemps la froidure, quand l’eau
De ses liens de glace écarte le fardeau.

Une autre source froide en merveilles abonde.
On voit flamber soudain au contact de son onde
L’étoupe et la résine, et leur reflet mouvant
Sur le miroir qui luit nager au gré du vent.
Il faut qu’elle soit riche en semences ignées,
Et que d’autres, du fond de la terre émanées,
Fendant l’eau d’outre en outre, émergent au dehors,
900Assez chaudes en bloc pour enflammer ces corps,
Mais non pour échauffer cette épaisseur fluide.
Sans doute que sous l’onde une force réside
Dont l’impulsion chasse et rassemble dans l’air
Les germes plus légers. Telle, au sein de la mer,
Jaillit, près d’Aradus, une source d’eau douce
Inaccessible au sel des flots qu’elle repousse ;
Tels, ces jets que la mer, en d’autres régions,
Conserve toujours purs de ces contagions,
À la soif des marins précieuse ressource !