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Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/145

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Et il disparut par la fenêtre.

Toute la journée, le pauvre Alan fut dans un état à faire pitié. Il songea d’abord à s’enfuir au loin et à ne pas aller au rendez-vous. Mais le pendu lui avait dit qu’il le retrouverait, en quelque lieu qu’il pût se cacher, et cela le retint.

Puis il eut l’idée de se pendre ; mais il avait de la religion et renonça à ce projet. Enfin, il pensa que ce qu’il avait de mieux à faire, c’était encore d’aller au rendez-vous et de prier Dieu de l’assister. Il pria et pleura toute la journée, au grand étonnement de sa jeune femme et de toute sa famille, qui ne comprenaient rien à sa conduite, et, la nuit venue, il quitta furtivement sa demeure, vers les onze heures, pour aller au rendez-vous. Il marchait lentement, hésitant encore, et en récitant force prières et oraisons. En sortant d’un chemin creux qui débouchait sur la lande, il entendit comme le vagissement d’un petit enfant nouveau-né. Et en effet, la lune étant sortie de dernière un nuage, il aperçut à terre un petit enfant tout nu, comme s’il venait de naître, et qui paraissait près de mourir de froid.

— Pauvre petite créature ! s’écria-t-il, ému de compassion, quelle est la mère dénaturée et sans entrailles qui t’a ainsi abandonnée ?

Et il ôta son habit, en enveloppa l’enfant, le posa sur le gazon, au bord de la route, et dit :