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Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/277

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Et maintenant que la méchante femme, le démon qui les persécutait, avait été précipitée au fond de l’enfer, ils vécurent tranquilles et heureux, le reste de leurs jours[1].

(Conté par Marguerite Philippe, novembre 1869.)
  1. Le recueil de M. Paul Sébillot (Contes populaires de la Haute-Bretagne) contient une version intéressante du même conte, sous le titre de La Fille aux bras coupés, page 105.
    Dans la Clé des champs ou les enfants parisiens en province, de Mlle Marguerite de Belz, on trouve aussi un conte provenant de la Cornouailles, et dans lequel il est question d’une jeune fille que son frère a abandonnée dans la forêt, après lui avoir coupé les deux bras. Il en est puni, car une épine qui lui est entrée dans le pied devient un grand arbre. La sœur, après diverses aventures, revient chez son frère et lui enlève l’épine devenue monstrueuse.
    Dans une légende qu’on lit dans les Veillées allemandes des frères Grimm, volume II, page 120 de la traduction de M. Héritier de l’Ain, 1838, et qui semble empruntée à Vincent de Beauvais, on attribue à Hildegarde, une des femmes de Charlemagne, une aventure qui, sur certains points, ressemble à celles de la Bonne femme de nos contes bretons. Il y est dit, en effet, que Talaud, frère de Charlemagne, pendant une des fréquentes absences du grand empereur, essaya de séduire Hildegarde. Mais celle-ci résista, renferma Talaud dans une tour et, au retour de Charlemagne, Talaud l’accusa d’avoir mené une vie déréglée et scandaleuse. Charlemagne ordonna à ses serviteurs de la conduire dans une forêt et de l’y abandonner, après lui avoir arraché les deux yeux. Un noble chevalier rencontre la reine avec ses deux bourreaux, la délivre de leurs mains et leur donne son chien, à qui ils arrachent les yeux pour les porter au roi, en signe de l’accomplissement de son ordre.
    Hildegarde se réfugia à Rome, où elle étudia la médecine et y acquit une grande célébrité.
    Cependant, Dieu punit Talaud par la cécité et la lèpre, et personne ne pouvait le guérir. Charlemagne alla avec lui à Rome consulter Hildegarde, sans qu’ils la reconnussent. Talaud confessa son crime au pape, et Hildegarde le guérit alors, et Charlemagne la reprit pour épouse.
    Un mystère breton en trois actes et en vers, intitulé la Vie de sainte Hélène, offre aussi des ressemblances avec notre conte, qui semble l’avoir inspiré. Ce mystère a été imprimé en 1862, chez Legoffic, à Lannion ; mais, longtemps avant cette époque, on le trouvait à l’état de manuscrit et de tradition orale, dans les fermes et les manoirs de l’arrondissement de Lannion.
    Dans la première livraison de la Revue de l’histoire des religions, 1880, page 141 et suivantes, M. Julien Vinson donne l’analyse d’un mystère basque roulant sur le même sujet, avec les mêmes ressorts, portant aussi le titre de Sainte Hélène, et qui a également de nombreux rapports avec notre conte.
    Les aventures si connues de Geneviève de Brabant ne sont pas aussi sans quelques ressemblances avec lui, ainsi que celles du Sire de Couci et de la Dame de Fayel, Gabrielle de Vergy.