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Page:Mémoires artistiques de Mlle Péan de La Roche-Jagu, écrits par elle-même.pdf/71

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Le lendemain, jour de mon audition, je reçus un grand nombre de personnes qui venaient me demander des billets. À 4 heures, je fis défendre ma porte, afin de me préparer. C’était le seul moment de la journée où, pour ainsi dire, je me trouvai seule, et libre de penser. Je me mis à table, lorsque, réfléchissant que dans quelques heures j’allais me trouver sur la sellette et jugée par un public qui, peut-être, serait prévenu contre moi, cette idée me fit repousser la côtelette que je me préparais à manger ; il me prit un tremblement qui ne me quitta plus. Enfin, à 6 heures une amie de ma mère vint me prendre : arrivée près de l’Hôtel-de-Ville, mon émotion redoubla en voyant la foule immense qui déjà se pressait aux portes. Les artistes ne tardèrent pas à arriver. La bonne demoiselle de Roissy, me voyant si émue, me dit que j’avais tort d’avoir peur, car elle ne doutait pas d’avance de mon triomphe. — À 7 heures et demie, la salle était comble, on fut forcé de faire fermer les portes. La plus belle société y était réunie. Les musiciens se placent, le chef d’orchestre a déjà son archet en l’air, le plus grand silence règne. Ce ne sont que les auteurs qui me liront qui, seuls, pourront comprendre la vive émotion