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Page:Mérimée - Colomba et autres contes et nouvelles.djvu/407

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Tournelles, M. de Malespine, M. de Machicoulis, M. des Tournelles. — M. des Tournelles a quatre voix. — Allons, cousin, au fauteuil.

Le comte de Fierdonjon, bas au marquis de Malespine. Déjà de la cabale ! Oh ! je ne resterai pas dans cette galère-là.

Le baron de Machicoulis, bas au marquis de Malespine. Elle veut tout gouverner.

Le comte. Messieurs, avant de commencer nos délibérations, que votre bienveillance m’autorise à présider, je vous demanderai la permission de vous présenter quelques considérations générales sur l’état actuel des affaires de l’Europe. Je me flatte que vous ne les trouverez pas tout à fait dénuées d’intérêt.

(Il tire de sa poche un discours écrit sur un assez grand nombre de petites feuilles de papier à lettres ; ces feuilles ne sont point attachées les unes aux autres.)

Édouard. Comment ! vous allez nous lire tout cela ? Diable !

Le comte. Ce n’est écrit que d’un côté, et à mi-marge encore.

Le comte de Fierdonjon, à part. C’est pour parler tout seul qu’il s’est fait nommer président.

(Le comte des Tournelles tousse, crache, met ses lunettes, et lit son discours d’une voix monotone et sans observer exactement la ponctuation, comme quelqu’un qui lit l’ouvrage d’un autre. Édouard cependant parle à l’oreille de la comtesse, qui lui fait signe d’écouter. Il n’en tient compte ; et elle, impatientée, lui tourne le dos. Il appelle alors le chien de Bertrand, le caresse, lui fait donner la patte, etc. ; puis, pendant que le comte tient dans sa main une des feuilles volantes de son discours, Édouard en prend deux ou trois sur la table sans qu’il s’en aperçoive, les chiffonne en boule, et les fait apporter au chien, qui les met en pièces. Personne ne remarque l’accident arrivé au discours.)

Le comte, lisant. « Messieurs, les voies de la Providence