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Page:Mérimée - Colomba et autres contes et nouvelles.djvu/428

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en costume (à Séville). On m’a dit que beaucoup s’y rendaient déguisés.

A un signal donné par le président de la course, un alguazil mayor, accompagné de deux alguazils en costume de Crispin, tous les trois à cheval, et suivis d’une compagnie de cavalerie, font évacuer l’arène et le corridor étroit qui la sépare des gradins. Quand ils se sont retirés avec leur suite, un héraut, escorté d’un notaire et d’autres alguazils à pied, vient lire au milieu de la place un ban qui défend de rien jeter dans l’arène, de troubler les combattants par des cris ou des signes, etc. À peine a-t-il paru que, malgré la formule respectable : « Au nom du roi, notre seigneur, que Dieu garde longtemps… » des huées et des sifflets s’élèvent de toutes parts, et durent autant que la lecture de la défense, qui d’ailleurs n’est jamais observée. Dans le cirque, et là seulement, le peuple commande en souverain, et peut dire et faire tout ce qu’il veut[1].

Il y a deux classes principales de toreros : les picadors, qui combattent à cheval, armés d’une lance ; et les chulos, à pied, qui harcellent le taureau en agitant des draperies de couleurs brillantes. Parmi ces derniers sont les banderilleros et les matadors, dont je vous parlerai bientôt. Tous portent le costume andalous, à peu près celui de Figaro dans le Barbier de Séville ; mais, au lieu de culottes et de bas de soie, les picadors ont des pantalons de cuir épais, garnis de bois et de fer, afin de préserver leurs jambes et leurs cuisses des coups de corne. À pied, ils marchent écarquillés comme des compas ; et s’ils sont renversés, ils ne peuvent guère se relever qu’à l’aide des chulos. Leurs selles sont très-hautes, de forme turque, avec des étriers en fer semblables à des sabots, et

  1. Depuis le rétablissement de la constitution, on ne lit plus le ban du roi, notre seigneur.