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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/221

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vers la dunette, et feignit d’apercevoir, pour la première fois, la jeune Mendoçaine Mutzi, cause innocente de ces retards et de ces discussions.

— Qu’aperçois-je là ? — dit-il en mettant sa main en auvent sur les yeux, et avec un sérieux de surprise bien joué.

Masse feignit de suivre le doigt indicateur du capitaine, et parut surpris comme lui.

— Ah ! — dit-il avec nonchalance ; — tiens ! je ne l’avais pas remarquée, celle-là !

— Pourquoi n’a-t-elle pas suivi les autres ? demanda le capitaine.

— Au fait, c’est vrai, dit Masse pourquoi n’a-t-elle pas suivi les autres ?

— Allons ! — dit Marchand d’un ton impérieux, — qu’on me jette tout de suite cette jeune fille à la mer ; qu’on rappelle les marins embarqués, et partons pour nous mettre à l’ancre devant la côte sud… Vous voyez, Masse, que votre capitaine exécute les ordres de son lieutenant.

— Ah ! oui… je vois que… dit Masse avec un embarras comique et un sourire qui ne l’était pas.

— Mes enfants ! dit le capitaine en se penchant sur l’échelle du côté des trois chaloupes ; — mes enfants, il faut remonter à bord ; nous allons déraper.

Un murmure respectueux de mutinerie éclata dans les trois embarcations, et les rames frétillèrent sous les mains des matelots.

— Capitaine, dit Masse, nous allons désespérer ces braves gens, je le vois. — Ah ça ! mais, entendons-nous enfin, mon cher Masse,