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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/232

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tabac. Le sultan destitua ces deux savants, et les fit enfermer, sur-le-champ, dans le château des Sept-Tours.

Les deux savants maudirent la science, et se promirent bien d’être plus ignorants une autre fois.

Une seconde expérience à la pipe et à l’ambre parut pourtant nécessaire au sultan ; il la fit le lendemain, après avoir cassé trente œufs d’autruche, toujours par le même procédé.

L’épreuve fut très-satisfaisante, c’est-à-dire qu’elle ne satisfit pas du tout le gracieux sultan ; l’odalisque Dilara était une des favorites, et, dans cette nouvelle vision du miroir, elle paraissait beaucoup plus éprise de l’Européen que du sultan.

— Allah ! — s’écria le Grand-Seigneur en se frappant le front ; que signifie ceci ? Si j’étais chrétien, je croirais que le diable s’en mêle, mais en qualité de croyant, je ne crois à rien, et je ne sais quel parti prendre pour rassurer mes esprits !

Il manda secrètement le chef des eunuques noirs, et lui dit :

— Surveilles-tu toujours avec attention et zèle ma caucasienne Dilara ?

— Oui, Hautesse.

— La nuit et le jour ?

— À toutes les minutes.

— Au milieu du jour, quand je vais au tir de Térapia, que font mes femmes ?

— Les unes sont au bain, les autres font de la musique ; il y en a qui dorment sur les divans ou sous les sycomores des jardins du sérail…