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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/242

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— Maintenant, Arzeb, il ne s’agit plus que de faire entrer la même idée dans le cerveau de la belle Haïva ?

— Ce sera plus difficile, remarqua Arzeb.

— Non, Arzeb. Voici comment tu dois agir. Prends cette épingle de saphir, et en te présentant devant Haïva, dis-lui que tu lui apportes le golfe Arabique dans ta main. Elle rira. Laisse-la rire. Sois sérieux. Ensuite tu lui donneras deux boucles d’oreilles de diamants d’Hyder-Abad, d’une très-grande valeur.

— Bien ! après ?

— Après, tu lui diras qu’elle a plus d’imagination que le poëte qui a inventé le Ramaïana.

— Oui, elle sera sensible à cet éloge.

— Une femme est toujours sensible à un éloge et à deux diamants.

— Je le crois.

Ensuite, Arzeb, tu lui donneras l’épingle de saphir, et du premier coup, elle croira y voir passer les vaisseaux de Surate et de Socotora.

— Sur l’épingle ?

— Oui, sur l’épingle. Je te l’affirme, Arzeb.

Arzeb s’inclina, prit l’épingle, la regarda fixement, et dit :

— Quant à moi, je crois qu’il y a deux golfes Arabiques, et que j’en tiens un au bout de mes doigts.

Il prit congé du jongleur, et exécuta ses ordres ponctuellement.

Sanali était un vrai sage, ce qu’il avait prévu ne pouvait manquer d’arriver. Haïva reçut les diamants, reçut l’éloge, et quand elle vit l’épingle de saphir, elle s’écria :