Aller au contenu

Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tête, et comprimant les cheveux trop vagabonds des rois primitifs.

Bélus, en rentrant dans son palais, avec sa couronne, se mira dans le clair bassin d’une fontaine, miroir de l’époque, et se trouva très-bien, malgré les épigrammes de son peuple : il renonça donc définitivement au bandeau sacré, dont parlent encore toutes nos tragédies.

Selon l’usage des fils de rois de cette époque, Ninus tua son père et, pour faire diversion à ce parricide, il fonda Ninive et épousa Sémiramis.

Selon l’usage des reines de cette époque, Sémiramis tua son mari Ninus, et monta sur le trône des Babyloniens.

Son royaume comprenait la Médie, la Bactriane, l’Asie Mineure, la Syrie, l’Égypte, et beaucoup de déserts. Babylone murmura beaucoup en voyant monter une femme sur le trône, car, disait-elle, le trône demande une grande majesté de maintien, et jamais une femme n’aura la majesté d’un roi.

Ces bruits arrivèrent aux oreilles de la grande Sémiramis.

Un jour, elle convoqua l’élite de Babylone dans le grand temple de Bélus, édifice qui couvrait une lieue de terrain dans sa longueur. Mille musiciens, échelonnés sur les rives de l’Euphrate, jouaient des fanfares délicieuses, que Rossini a exhumées d’une fouille pour les mettre dans sa divine Semiramide.

La grande reine descendit de ses jardins suspendus, et vint passer devant son peuple, sous les colonnades infinies, qui remplaçaient les arbres absents, et donnaient une fraîcheur de marbre aux heures brûlantes du milieu du jour.