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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/276

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Sémiramis portait une robe de lin tissue à Tyr, et d’une souplesse merveilleuse ; mais toutes les grandes dames babyloniennes avaient des robes de la même manufacture, et si la reine n’avait eu que cet ornement, elle n’aurait produit aucune sensation. Heureusement, Sémiramis, en fouillant dans les antiques reliquaires de famille, avait découvert la couronne que Bélus portait si gauchement, et elle la posa sur son front, pur et blanc comme un ovale de marbre de Paros. Prenez une tige de lis dans la plaine de Saron, et placez-la sur le casque de cuir d’un soldat numide ; placez-la ensuite dans les boucles de cheveux noirs d’une vierge du Caucase et vous verrez tour à tour éclater le rire et l’admiration devant la même tige de lis. Ce ne sera pas la faute de la fleur, mais la faute du choix.

Une couronne d’or à pointes est un ornement ridicule sur la tête d’un roi ; cela est si vrai que les rois l’ont reconnu eux-mêmes et qu’ils ne la portent plus. On ne trouve plus de monarques couronnés de cette façon que dans les vieux tableaux et dans le brelan carré des rois de cartes.

En 1830, Louis-Philippe portait sur sa tête un chapeau gris de douze francs, et même assez mal brossé.

Sémiramis obtint un succès immense d’admiration enthousiaste avec la même couronne qui avait excité tant d’hilarité autour du vénérable front de Bélus.

Lorsque cette magnifique reine parut sous le premier péristyle du temple, les fanfares de Rossini furent étouffées par les acclamations populaires.

— Par le soleil ! par Mithra ! s’écriait-on en babylonien, qu’elle est belle ! qu’elle est grande ! quelle est reine ! Que