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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/89

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raconte les idylles de son Théocrite, nous révèle ses villes enfouies, nous explique l’origine de ses temples, nous dise les noms des puissants architectes et sculpteurs qui ont bâti et ciselé ses monuments merveilleux, à une époque où la Grèce n’avait pas trouvé son nom. Cette île généreuse, berceau de toutes les grandes choses, n’est pas destinée à tenir éternellement comptoir de denrées coloniales, elle a un passé trop noble pour mériter un avenir si vulgaire ; comme la Sicile a été la grande Grèce, Java a été la grande Asie ; et quand on aura fouillé profondément ses abîmes de verdure massive, qui s’étendent autour de ses cratères éteints, on en verra sortir des Herculanum inconnues, toutes pleines de surprises et d’émouvantes révélations.

Les conquêtes de la paix et des arts s’étendront plus loin encore.

Il faudra bien aussi féconder Bornéo, cet immense écrin avare, qui garde tant d’or et de jachères ; Sumatra, qui coupe en deux tronçons la ligne de l’Équateur, comme une lame d’acier flottante sur l’Océan ; l’Archipel embaumé des Moluques et des Philippines, terrestre constellation, voie lactée d’îles, qui ne demandent qu’à briller au soleil ; et toutes ces régions océaniques, labourées par le vaisseau de Lapeyrouse et le génie du grand Louis XVI ; la presqu’île de Segalin, Bengale en miniature, toute pleine de bois et d’escadres en herbe ; Segalin, où Lapeyrouse avait fondé l’avenir de la France, entre la mer Tarrakaï et la mer du Japon ; les îles de Jesso et de Nippon qui excitaient la convoitise nationale de Louis XVI, pendant qu’on lui préparait un échafaud ; et sur des zones opposées, tout l’empire du Japon, conquis