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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/100

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LE LIVRE

lequel eſt amendé, la mercy Nre ſeigneur, j’en ay moult grant joie. Pour tant je mettray tele diligence à la bien aprenre que quant il plaira à Dieu que je vous voie, je la chanteray avec vous du mieus que je pourray ; & auſſi me plaiſt-elle moult, pour tant que vous m’avez mandé que la muſique vous plaiſt. Et certes je ne pren nul ſi grant plaiſir à chanter, ne à oÿr nulles chanſons ne nuls dis, comme je fais à ceus qui viennent de vous ; car pour le bien que j’en ay oÿ, & que je croy qu’encore y ait-il plus que on ne pourroit dire, je aim & tieng chier tout ce qui de vous vient, & je n’euſſe pas creu, pour nuls qui le me déiſt, que je peuſſe avoir ſi grant amour à nul homme ſans que je l’éuſſe veu, comme j’ay à vous. Car dès ce que je oÿ premierement retraire le bien & l’onneur qui eſt en vous, il ne fu pas heure que mon cuer ne vous amaſt ; & encore croiſt & croiſtera l’amour de jour en jour. Et ſur ce, je vous envoie un virelay, lequel j’ay fait ; & ſe il y a aucune choſe à amender, ſi le vueilliés faire, car vous le ſarés mieus faire que je ne ſais ; j’ay trop petit engien pour bien faire une tele beſongne, & auſſi n’eus-je onques qui rien m’en apreniſt. Pour quoy je vous pri, tres-chiers amis, qu’il vous plaiſe à moy envoier de vos livres & de vos dis ; par quoy je puiſſe tenir de vous à faire de bons dis & de bonnes chanſons ; car c’eſt le plus grant esbatement que je aie, que de oÿr & de chanter bons dis & bonnes chanſons, ſe je le ſavoie bien faire. Et quant il plaira à Dieu que je vous voie, laquelle choſe je deſire tant que je ne le vous porroie eſcrire ne vous ne le porriés penſer, s’il vous plaiſt vous les m’apenrez à mieus faire & dire. Car je en apenroie plus de vous en un jour que je ne feroie d’un autre en .i. an. — J’ay receu les lettres que vous envoiés à mon frère,[1] & me ſuis tant faite forte de

    de ce genre. Le varlet, en allant de Gaſcogne en Lorraine, avoit pu, d’ailleurs, chemin faiſant, recevoir la lettre qu’il devoit remettre à Machaut, en traverſant Reims.

  1. Ce frère pourroit bien avoir été Henry d’Armentières. En 1394,