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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/121

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DU VOIR-DIT.

Pour aler où je deſiroie
Cent fois plus que ne vous diroie.
Mais, ainſois, fis cette balade
De joli ſentement & ſade,
Et en ces lettres l’encloÿ
Dont ma dame moult s’esjoÿ.

BALADE. Et y a chant.

Dès quon porroit les eſtoilles nombrer,
Quant on les voit luire plus clerement,
Et les goutes de pluie & de la mer,
Et l’arene ſur quoy elle s’eſtent,
Et compaſſer le tour du firmament,
Ne porroit-on penſer ne concevoir
Le grant deſir que j’ay de vous véoir.

Et ſi ne puis par devers vous aler,
Pour Fortune qui le wet & deffent,
Dont maint ſouſpir me convient eſtrangler,
Quant à vous penſe & je ſuis entre gent.
Et quant je ſuis par moi ſecretement,
Adont me fait tous meſchiés recevoir
Le grant deſir que j’ay de vous véoir.

Car il me fait complaindre & dolouſer
Et regreter voſtre viaire gent,
Et vo biauté ſouveraine & ſans per,
Et la tres-grant douceur qui en deſcent ;
Ainſi me fait languir piteuſement,
Mon cuer eſprent, & eſtaint mon eſpoir,
Le grant deſir que j’ay de vous véoir.


X. — Ma tres-chiere & ma tres-ſouveraine dame, à envis muert qui apris ne l’a ; ne bons cuers ne pu et mentir, & qui bien aimme à tart oublie. Vous m’avez fait, Dieus le vous mire, tant de biens & d’onneurs, de graces & de douceurs, que onques dame ne fiſt tant à ſon ſervant & ami, (com vaillans que il