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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/165

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DU VOIR-DIT.

Je bus petit, & mains menjay,
Et à la table adès ſonjay
Comment ma dame eſtoit venue,
Pour faire ſi courte venue ;
Qu’aſſez mieus vaulſiſt ſa demeure,
Que venir & r’aler en l’eure.

Je repris ma devotion ;
Mais plus eſtoit m’intention
À penſer à ma vravelette,[1]
(C’eſt à dire à ma damelette,)
Qu’elle n’eſtoit n’à ſaint n’à ſainte.
Si avoie penſée mainte
Qu’amans n’eſt unques aſſévis,[2]
N’aſſaſiés à ſon devis ;
Et s’avient po ſouvent, ſans faille,
Qu’aucune choſe ne li faille.
S’avoit en mon cuer grant rumour,
Que feroie de ceſte amour
Où ainſi me ſuis embatus.
Pour c’eſtoie tous abatus,
Que la voy à trop grant dangier ;[3][App. XXX.]
Et ce faiſoit joie eſtrangier
De moy, ſi que je ne ſavoie
Comment maintenir me devoie.
Si appellay mon ſecretaire,
Et li fis ceſte lettre faire ;

  1. À ma demoiſelle, puellula. Diminutif du mot allemand fraülein, fraaulette ou vraaulette.
  2. Aſſouvi.
  3. J’étois tout abattu, parce que je la voyois avec trop de difficulté.