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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/181

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DU VOIR-DIT.

De penſer ſi tres-fauſſement
Qu’un feroit, & l’autre diroit,
Et ſa dame ainſi traÿroit !
Li uns Jheſucriſt li jura[1]
Qu’il l’amera tant com durra,
Li autres li fiancera
Que ſans retollir ſiens fera,[2]
Et ce, tout pour li decevoir !
Qu’elle ne ſaura percevoir
Sa traÿſon, ſa mauvaiſté
Et ſa mortel inimiſté.
Hé Dieus ! quel foy ; hé Dieus ! quel homme !
On le devroit geter en Somme,
Ou deſſoubs le pont à Soiſſons,
Pour faire viande aus poiſſons.
Que demande-on ces famelettes ?[3]
Elles ſont ſi tres-doucelettes,
Si plaiſans & ſi amoureuſes,
Si amiables ſi piteuſes,
Que riens ne ſcevent refuſer ;
Si ne les doit-on pas ruſer,
Decevoir, honnir ne trichier,
Ains les doit-on avoir ſi chier
Com on doit avoir ſa main deſtre.
Endroit de moy, je vueil tels eſtre
Qu’elles ſeront de moi chieries,
Sans penſer maus ne tricheries ;
Et tous mes jours les ſerviray

  1. L’un lui jura par Jéſus-Chriſt.
  2. Sans retollir, ſans garder droit de reprendre. Expreſſion juridique qui revient ſouvent ici.
  3. Que demande-t-on à ces foibles femmes…