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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/193

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DU VOIR-DIT.

On ne me doit mie reprendre,
Se de fin cuer l’aim ſans meſprendre.
Et j’en acquier & los & pris,
Si je l’aim, ſer & loe & pris.
Mais ſe j’amoie une chetive,
On me devroit deſſus la rive
Getter en une iaue parfonde,
Ou eſcerveler d’une fonde.
Et ſe chetive la ſavoie,
Par ma foy, jà ne l’ameroie.
Si doy bien eſtre ſus ma garde,
Et fort penſer, que ſi me garde
Qu’envers li ne penſe ne face
Choſe qui ſon honneur efface :
Car en cas que je le feroie
Envers Amour me mefferoie,
Et tout le bien que j’ay de li
Seroit mort & enſeveli.

Moult deſiroie le retour
Vers ma dame au plaiſant atour,
Si ne faiſoie qu’eſpier
Penſer, muſer & colier,
Comment par gré me departiſſe,
Par coy toſt ma dame véiſſe.
En la fin j’alay congié prendre ;
Mais Monſeigneur me ſiſt attendre
Contre mon gré, .iii. jours ou quatre,
Pour ſolacier & pour esbattre.
Et puis par ſon gré me parti,
Et de ſes biens me reparti,
Ainſi com ci-devant dit l’ay.
Et lors me parti ſans delay