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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/202

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[vers 3493]
LE LIVRE

En flun de paradis terreſtre ;
Car de tout le bien qui puet eſtre
Par honneur, eſtoie aſſevis
Et ſaoulés, à mon devis
Sans plus, pour la grant habundance
Que j’avoie de ſouffiſance.
Car tout ce qu’elle me diſoit,
Trop hautement me ſouffiſoit ;
Et tout le bien que je ſentoie
À gouſt de merci ſavouroie,
Sans penſer mal ne tricherie ;
Car trop eſtoit de moy cherie.
Pour ce vueil un po parler ci
Quel choſe ce eſt de merci.

L’un aime, crient & ſert ſa dame,
Sans penſer ne deſirer blame,
Sans plus, pour venir à vaillance ;
Et ſe met ſouvent en balance
De toſt valoir ou toſt morir,
Sans demander autre merir ;
Et va cerchant les guerres dures
Et les lointaines aventures.
Souvent ha ſain & po d’argent,
Et moult ſouvent paſſe par gent
Qui trop plus toſt li oſteroient
Le ſien que rien ne li donroient ;
Et moult ſouvent tout perderoit
Puis qu’il ne ſe deffenderoit.

Li autres ne vuet que jouſter :
Mais encor y vueil adjouſter
Danſer, chanter & caroler.