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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/207

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DU VOIR-DIT.

Et elle fiſt ce rondelet
Qui ne me ſemble mie let,
Car il n’i ha rien que reprendre ;
Mais elle le fiſt ſans attendre,
Et ſi volt que je l’emportaſſe
Ainſois que de là m’en alaſſe.

RONDEL.

Autre de vous jamais ne quier amer,
Tres-dous amis cui j’ay donné m’amour ;
Car à mon gré je ne puis mieus trouver.
Autre de vous jamais ne quier amer.
Et ſi fay bien, ſans le plus eſprouver,
Que voſtre cuer fait en moy ſon demour.
Autre de vous jamais ne quier amer,
Tres-dous amis cui j’ay donné m’amour.

Finablement li termes vint
Que de li partir me convint ;
Si prins congie moult humblement,
Acompaigniés petitement
De Sens, de Manière & d’Avis.
Mais elle vit bien à mon vis
Qu’en l’eſperit bleciés eſtoie,
Quant ainſi ma coulour muoie.
Car j’eſtoie deſcoulourés,
Triſtes, dolans & eſplourés ;
Pour ce que j’eſtoie certains
Que de li ſeroie lointains
Longuement, contre mon voloir ;
Et ce me faiſoit trop doloir.
Mais la Très-belle & bonne & ſage,
Au gentil corps, au franc courage,
Me prinſt doucement par la main,