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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/27

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SUR LE POËME DU VOIR-DIT.

Ce vous requiert li baillis de Valois ;
Car il n’en eſt aujourdhui nul en vie
Tel comme il fu ne ne ſera, je crois.
Complains ſera de princes & de rois
Juſqu’à lonc tans, pour ſa bonne pratique.
Veſtez-vous noir, plourez tous, Champenois,
La mort Machaut le noble rethorique.[1]

Un ſiècle plus tard, l’auteur d’un Traité de la ſeconde Rethorique, c’eſt-à-dire des choſes rimées, ſe gardoit bien d’oublier Guillaume de Machaut. « Ce fut, dit-il, le grand rethorique de nouvelle forme ; il comencha tailles nouvelles, & fiſt parfais lais d’amour. »

Enfin, un peu plus tard encore, le roi René, ſi bon prince & ſi mauvais poëte, réſervoit une place à Guillaume de Machaut dans ſon Hoſpital d’amour. Il lui marquoit ſon tombeau juſtement au-deſſus d’Ovide, & au-deſſus non-ſeulement de Jean de Meun & d’Alain Charrier, mais de Boccace & de François Pétrarque, dont les Canzoni couroient déjà le monde. Les vers qu’on va lire ſemblent donner à croire que le roi René ſe méprenoit ſur le ſens du titre Le Voir-Dit ; car il en fait le nom de la dame qui l’avoit inſpiré : « Joignant de celle tombe d’O-

  1. Œuvres inédites d’Euſtache Deſchamps, publiées par M. Proſper Tarbé. 1849, p. 30 & 31. — Rethorique eſt ici adjectif, dans le ſens de poëte.