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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/279

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DU VOIR-DIT.

« Que trop longue choſe ſeroit
« Qui chaſcun mot repeteroit.
« Si me paſſeray pour brieté
« De m’onneur & de ta grieté ;
« Et me garderay de meſprendre :
« Si que n’i ara que reprendre,
« Se je puis & Dieus le m’ottroie.

« Et de ce mal qui te maiſtroie,
« Et qui t’a ſi mal atourné
« Pour l’ymage qui t’a tourné
« Son chief, & de ſa veſtéure
« De bleu qu’eſt muée en verdure,
« Qui ſignefie fauſſeté ;
« Biaus amis, c’eſt grant niceté
« Dou penſer ; car il le te ſemble,
« Tu dors & paroles enſemble,[1]
« Et ſi m’eſt avis que tu ſonges.
« On ne doit pas croire les ſonges ;
« Raiſons eſt que tu la véiſſes,
« Ainſois que d’elle te plaingniſſes.
« Et s’en bon eſtat la trouvoies,
« De li plaindre ne deveroies ;
« Car amans qui ſe plaint à tort
« Ha cuer rude, nice & entort.
« Eſveille-toy & la regarde ;
« Car t’amour n’eſt pas li muſarde
« Qu’elle jamais riens te déiſt
« De quoy le contraire féiſt.
« Tu ſeroies plus esbahis
« Que cers ramés & eſtahis,

  1. Tu dors & tu parles en même temps, comme ſi tu étois éveillé.