Aller au contenu

Page:Madeleine - Quelques poëtes français des XVIe et XVIIe siècles à Fontainebleau, 1900.djvu/109

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 93 —

chose sur son peu de considération. Mais luy prenant ceà paroles pour offensives, tira son espée à moitié du fourreau, comme s’il m’en eust voulu frapper, moy qui n’en avois point, et qui estois d’une autre condition que luy ; son action desraisonnable m’émeut d’une estrange façon. Il pût connoistre à mon visage, et à ce que je luy dis de sa lâcheté, que la chose ne basteroit pas trop bien pour luy, et deslibera de s’esvader ; mais je courus au premier laquais qui passoit, et luy demandant son espée, j’eus en moins de rien attrapé cet indiscret. Les gardes du Prince estoient en haye dans la basse-court attendant qu’il revint de la chasse, où il estoit allé, et mon homme y creust estre à refuge ; mais l’aveugle désir que j’avois de me vanger de cet affront, ne me donna pas le loisir de raisonner sur cette affaire. Je ne laissay pas pour les gardes de lui donner deux grands coups d’espée : et je luy en eusse peut-estre donné davantage, si trois ou quatre piques abbaissées ne m’en eussent point empesché. Cette insolence que je commis fît eslever un grand murmure ; trois ou quatre officiers me saisirent pour me retenir prisonnier, mais un Lieutenant du Régiment qui me